epath-2025

Censures et définancements, rapport Cass et consensus continentaux, actualités scientifiques… nos retours sur l’EPATH 2025

Cette année, comme il y a deux ans, 13 membres de nos équipes hospitalières et associatives se sont rendu·es au congrès de l’association européenne des professionnel·les de la santé trans (EPATH), qui a eu lieu à Hambourg du 3 au 6 septembre. Les équipes ont présenté 3 interventions, portant sur l’étude de Claire Vandendriessche (coordinatrice associative et médiatrice-pair de TJT), déjà discutée sur notre site ici, celle de Marine Bouron et celle d’Alice McGovern (internes à l’équipe EPPAT de l’hôpital Robert Debré). L’étude portée par Marine Bouron s’intitulait « Comparaison de la qualité de vie des jeunes adultes transgenres selon le moment de la chirurgie thoracique masculinisante : avant ou après l’âge de 18 ans » et celle d’Alice McGovern « Exploration de l’émergence de l’identité transgenre : âge et modalités d’apparition dans une population transgenre auto-déclarée à travers une enquête en ligne », et seront toutes les deux discutées sur notre site après leur publication.

Voici quelques retours sur certaines des interventions auxquelles nous avons assisté.

Censures et définancements massifs sous Trump : la situation des États-Unis et dans le monde

Asa Radix, médecin infectiologue au centre communautaire de santé Callen-Lorde de New York, et actuel président de l’association mondiale des professionnel·les de la santé trans (WPATH), est revenu sur la situation des personnes trans aux États-Unis depuis le début de la nouvelle présidence de Donald Trump.

Son intervention, grave, reflétait l’état de désespoir des personnes trans impactées par la politique de Trump à leur encontre, aux États-Unis mais aussi dans le reste du monde. Il a rappelé que la prévalence au VIH dans le monde était extrêmement importante pour les personnes transféminines, de l’ordre de 20 %, soit une probabilité d’infection 66 fois celle de la population générale (Stutterheim et collègues, 2021). Il a rappelé, études à l’appui, que l’accès aux soins hormonaux, chirurgicaux, et à un environnement clinique trans-affirmatifs, constituaient des leviers d’action en santé publique très influents pour améliorer la rétention dans les soins antirétroviraux, et ainsi mieux lutter contre l’épidémie du VIH/SIDA dans la communauté trans mais aussi dans la population générale. Ainsi, le HHS (Ministère américain de la santé), en septembre 2022, recommandait qu’un modèle de soins d’affirmation de genre soit instauré dans les services d’infectiologie « pour améliorer la rétention dans les soins antirétroviraux et maximiser la probabilité d’atteindre une suppression virale soutenue ». Une recommandation « forte », appuyée par « des données d’essais cliniques non-randomisés bien construits ou par des données de cohortes observationnelles de long terme ».

Le 20 janvier 2025, le président Donald Trump décrète (Executive Order 14168) l’ordre suivant :

« Il est de la politique des États-Unis de reconnaître deux sexes, masculin et féminin. Ces sexes ne sont pas interchangeables et reposent sur une réalité fondamentale et incontestable. […] Chaque agence et tous les employés fédéraux doivent appliquer les lois […] afin de protéger les hommes et les femmes en tant que sexes biologiquement distincts. […] Les agences doivent supprimer toute déclaration qui promeut ou inculque d’une quelconque manière l’idéologie du genre. […] Abroger tous les documents incompatibles avec ce décret. »

Dans les 24h qui ont suivi cet ordre, les sites internet des agences fédérales ont supprimé toute référence aux contenus trans/LGBTQ+, le CDC (centre de contrôle des maladies) a supprimé les contenus parlant de « genre », de « transgenre » ou de « LGBT », le département d’état a suspendu tout nouveau changement de mention de sexe sur les passeports et réimprimé les nouveaux passeports aux anciennes mentions de sexe, et a également supprimé tout contenu « LGBT » dans les rapports sur les droits humains. Le gouvernement Trump a également tenté de définancer les structures publiques soignant les mineur·es trans, action limitée par des décisions judiciaires. Les recommandations de bonnes pratiques du HHS, fondées sur l’état de la science, visant les personnes trans vivant avec le VIH, ont été supprimées des agences fédérales.

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Six jours plus tard, un autre décret gouvernemental (Executive order 14187), déclare tous les soins d’affirmation de genre comme « mutilants », et ordonne le définancement fédéral des soins d’affirmation de genre (y compris pour les adultes trans), et menace de définancer totalement les hôpitaux qui poursuivraient les soins aux mineur·es trans. 22 hôpitaux ont ainsi été contraints de fermer leurs consultations spécialisées.

Entre janvier et août 2025, 800 millions de dollars de coupes budgétaires sur les fonds de recherche des NIH (instituts nationaux de santé) pour la santé des personnes LGBT sont validées par la Cour Suprême des États-Unis, à majorité conservatrice. Dans la même veine, un décret gouvernemental (Executive Order 14169) a gelé le fonds PEPFAR de lutte contre le VIH/SIDA dans le monde, coupant soudainement l’approvisionnement de services humanitaires en santé globale à des dizaines de millions de personnes séropositives dans le monde. Sont particulièrement visés par ce gel les « programmes portant l’idéologie de genre ou de diversité, égalité et inclusion (DEI) », entraînant la fermeture de cliniques fournissant aux personnes trans des soins antirétroviraux de traitement ou de prophylaxie (PrEP), de santé mentale, d’affirmation de genre et de réduction des risques aux usages de drogues, tous ayant démontré leur efficacité pour réduire les risques liés au VIH.

Rapport Cass : quelle indépendance ?

Le professeur de psychiatrie allemand Georg Romer, coordinateur des recommandations de bonnes pratiques cliniques pour les jeunes transgenres de l’AWMF sorties en 2025 (déjà discutées sur Trajectoires Jeunes Trans ici), est revenu sur le rapport d’Hilary Cass de 2024. Il a rappelé, dans son intervention, que ce rapport avait été commandé par le NHS England (service ministériel anglais de la santé) afin « d’améliorer la prise en charge des enfants et adolescents en questionnement ou incongruence de genre », et confié à une personne jugée « indépendante » (la pédiatre britannique Hilary Cass), pour son absence d’expertise dans le domaine considéré (aucune pratique clinique auprès du public dont il s’agit d’évaluer les soins).

Georg Romer remarque, en se penchant sur les précédents « rapports indépendants » commissionnés au Royaume-Uni que « l’indépendance des évaluateurs vis-à-vis des services à examiner était garantie, tout en étant combinée à la reconnaissance de leur expertise dans le domaine concerné. L’indépendance vis-à-vis de l’expertise spécialisée – c’est-à-dire la capacité à considérer un domaine complexe ‘de l’extérieur’ – n’avait auparavant pas été définie comme une qualité requise. » Entre les lignes, Georg Romer laisse suggérer que l’indépendance, telle qu’elle avait été conçue jusqu’avant le « Rapport Cass », ne se confinait pas à une ignorance du domaine.

Georg Romer enchaîne sur la question de l’indépendance du « Rapport Cass », rappelant qu’une seule autrice (Hilary Cass) avait été déclarée par le NHS England, et qu’aucune déclaration de lien d’intérêt n’avait été publiée, ne permettant à personne de juger de l’indépendance réelle de toute source de conflit d’intérêt.

Sur la question de l’indépendance vis-à-vis des agendas politiques, Georg Romer rappelle des déclarations publiques de juin 2023 de Sir Sajid Javid, ancien Ministre britannique de la Santé (en 2021-2022) : « Je suis devenu ministre de la Santé en juin 2021 […] Le NHS avait déjà lancé une évaluation indépendante du service GIDS, menée par la Dre Hilary Cass. Elle approchait de la publication de son rapport intermédiaire, elle avait donc de nombreux résultats, et je souhaitais la rencontrer – ce que je lui ai demandé. Et ce que j’entendais, c’est que de jeunes personnes se présentaient au NHS en disant : “Je pense être une fille dans un corps de garçon” ou l’inverse, et qu’au lieu de remettre cela en question, avec prudence, l’approche adoptée était entièrement affirmative – un auto-diagnostic, en somme. C’était un immense scandale. Dès que j’ai appris tout cela, j’ai estimé qu’il fallait agir. J’ai rencontré les dirigeants du NHS, et j’ai entamé le processus de fermeture du Tavistock. »

À en croire les propos publics de l’ancien ministre, Hilary Cass lui a présenté un portrait catastrophiste de l’approche médicale hospitalière britannique fournissant des soins d’affirmation de genre aux mineur·es trans (les unités GIDS de la fondation Tavistock), et ce, avant même que ne soient connus les travaux de méta-analyse de la littérature (commandés pour le rapport Cass et publiés en 2024), ce qui remet en question profondément l’indépendance supposée de la pédiatre, a fortiori vis-à-vis du pouvoir politique. « L’immense scandale » dont se fait l’écho l’ancien ministre, doit être mesuré à l’aune des résultats de l’audit réalisé ultérieurement par Cass elle-même et publié en 2024 : sur la population suivie au service spécialisé « GIDS » de la Tavistock entre avril 2018 et décembre 2022, seul·es 27 % des patient·es ont été orienté·es en endocrinologie, après une moyenne de 6,7 consultations pédiatriques (Annexe 8, p. 9). De plus, sur les 3 306 patient·es ayant fait l’objet de l’audit, Cass a observé moins de 10 cas de détransitions, soit moins de 0,3 % de la patientèle (Annexe 8, p. 13).

Sans conclure sur l’indépendance réelle ou supposée d’Hilary Cass vis-à-vis des pouvoirs publics, Georg Romer statue que « malgré ses mérites reconnus pour offrir une vision globale du domaine et une approche holistique, le rapport Cass ne peut pas être considéré comme – ni se substituer à – des lignes directrices médicales conformes aux normes internationales de la médecine fondée sur les preuves. » Il se penche plutôt sur la définition que donne l’association allemande de médecine de ce qu’est la médecine fondée sur les preuves (« evidence-based medicine ») : « La médecine fondée sur les preuves consiste en l’utilisation consciencieuse, explicite et judicieuse des meilleures données scientifiques externes disponibles afin d’éclairer les décisions relatives aux soins médicaux des patients. La pratique de la médecine fondée sur les preuves repose sur l’intégration de l’expertise clinique individuelle avec les meilleures données externes issues de la recherche systématique. Elle repose sur trois piliers : l’expérience clinique individuelle, les valeurs et souhaits du patient, et l’état actuel de la recherche. » En somme, nul ne peut élaborer des recommandations cliniques fondées sur les preuves sans avoir une expertise clinique dans le domaine considéré.

En exemples de recommandations fondées sur les preuves, Georg Romer cite la méta-analyse de Meng et collègues (2022) : 82 % des recommandations médicales de prescriptions de médicaments pédiatriques hors autorisation de mise sur le marché sont fondées sur des preuves incertaines à très incertaines. Elles sont pourtant bel et bien recommandées en première intention, soit parce qu’elles ont démontré leur efficacité chez les adultes, soit parce que leur sûreté a déjà pu être démontrée dans d’autres indications pédiatriques, soit par manque d’alternatives thérapeutiques, ou parce que l’absence de prescription serait éthiquement injustifiable. Romer met ainsi en garde contre la fausse équivalence qui devrait avoir lieu, exclusivement dans la médecine liée à l’incongruence de genre, entre certitude des preuves et force des recommandations cliniques, car une telle équivalence n’existe pas ailleurs.

Les consensus continentaux depuis 2024

Depuis 2024 et la publication du rapport d’Hilary Cass, quelles sont les recommandations fondées sur les preuves qui ont été publiées en Europe continentale ? Georg Romer, dans son intervention, en dénombre cinq :

L’outil d’évaluation standard des recommandations cliniques AGREE II (Brouwers, 2010) est utilisé par Georg Romer pour évaluer et comparer ces différentes recommandations, en incluant le rapport d’Hilary Cass (cf. figure ci-dessous).

comparaison-recommandations

Le rapport d’Hilary Cass se distingue uniquement par le développement de revues systématiques de littératures (jusqu’à l’année 2023), un point que seul partage l’AWMF (cette dernière a procédé à des revues systématiques de littérature jusqu’à l’année 2020, qui ont été complétées par l’étude des méta-analyses commandées par Cass).

En revanche, le rapport Cass manque totalement de représentation des différentes disciplines concernées, pourtant un critère de qualité dans l’outil AGREE II. Georg Romer relève qu’une pédiatre (Hilary Cass) comme seule autrice, les autres disciplines pertinentes étant seulement consultées, et non mandatées comme co-autrices. Là encore, l’AWMF se distingue : chaque co-auteur était mandaté par une société professionnelle médicale ou psychothérapeutique (pédopsychiatrie, pédiatrie, endocrinologie, sexologie, éthique médicale, psychothérapie…).

En ce qui concerne la méthode de formulation des recommandations, Romer souligne que Cass ne l’a pas décrite, rappelant également que le rapport ne peut pas être considéré comme un « consensus » (du fait de l’unique autrice). L’AWMF en revanche, obtient un score élevé sur ce critère : des conférences de consensus structurées avec une modération externe et la possibilité de soumettre des opinions dissidentes ont été mises en place. La force du consensus est documentée pour chaque recommandation individuellement (supérieure à 95 % pour presque toutes).

Comme autre critère de qualité de recommandations cliniques selon l’outil AGREE II, l’AWMF performe particulièrement sur l’évaluation externe de ses recommandations :

  • Phase de consultation en ligne transparente (via Lime Survey) après la première version du projet (mars 2024), ouverte exclusivement aux membres des 28 organisations impliquées (dont 2 organisations de patients).
  • Tous les commentaires reçus et leur prise en compte dans la révision du projet sont publiés dans le rapport méthodologique.
  • Examen externe et certification du rapport méthodologique par l’institut AWMF.
  • Version révisée, incluant certaines recommandations modifiées, approuvée finalement par les 28 conseils exécutifs des organisations participantes, avant la certification et la publication finale par l’AWMF.

En revanche, toujours sur ce critère, Romer rappelle que le rapport Cass n’a fait l’objet d’aucune évaluation externe.

Enfin, s’agissant des conflits d’intérêt (« COI »), tous les membres auteurs ou contributeurs des recommandations ont divulgué leurs liens d’intérêt ce qui, en cas de conflit d’intérêt, les excluait de pouvoir diriger un chapitre des recommandations. Le rapport Cass n’a pas fait de déclaration de liens d’intérêt, empêchant quiconque d’évaluer son indépendance réelle.

S’agissant du contenu des consensus continentaux de la France, la Suisse, l’ESPE, la Pologne et l’Allemagne (AWMF), nous pouvons dresser des divergences et des points communs :

  • Les divergences apparaissent d’abord dans la phase diagnostique et le soutien psychosocial. L’Allemagne impose une évaluation psychiatrique complète de la capacité à consentir, associée à un co-consensus parental. La France et la Suisse privilégient une approche multiprofessionnelle, avec dépistage des troubles co-occurrents et un accompagnement psychologique continu. La Pologne met l’accent sur l’évaluation neuropsychologique détaillée et la prudence face aux effets d’une évaluation prolongée, tandis que l’ESPE recommande un soutien psychosocial constant tout au long du parcours de soin.
  • Concernant les bloqueurs de puberté (GnRHa), les pays divergent sur le degré d’ouverture et les conditions de mise en œuvre. L’Allemagne autorise l’administration avec consentement parental même sans pleine capacité du jeune, tandis que la Suisse exige une évaluation individualisée du rapport bénéfice/risque. L’ESPE et la France fixent des critères stricts (stade de développement pubertaire Tanner ≥ 2, évaluation mentale experte, consentement éclairé du jeune et des parents). La Pologne suit une logique similaire, ajoutant la nécessité d’un suivi psychiatrique constant. Tous reconnaissent les incertitudes sur les effets à long terme, ce qui conduit à recommander des suivis réguliers et des données de recherche systématiques.
  • Pour la thérapie hormonale d’affirmation de genre, les convergences se renforcent : tous les documents exigent la présence d’une dysphorie persistante, la maturité physique (stade Tanner 2 minimum), l’absence de contre-indications médicales et un consentement éclairé. L’Allemagne et la Suisse se distinguent cependant par une plus grande rigueur : en Allemagne, le traitement ne peut être initié sans confirmation de la capacité à consentir, tandis que la Suisse interdit toute décision par procuration pour des interventions irréversibles. Les lignes directrices françaises encadrent étroitement le suivi biologique et vitaminique. La Pologne juge nécessaire un suivi continu par un spécialiste en santé mentale.
  • Concernant la chirurgie, l’Allemagne proscrit toute chirurgie génitale avant 18 ans, la chirurgie thoracique étant possible à la minorité après évaluation collégiale. La Suisse rend explicite également la possibilité de chirurgie thoracique avant 18 ans (si la pleine capacité du jeune est reconnue).
  • S’agissant de la fertilité, l’Allemagne rend le conseil en fertilité obligatoire, la Suisse exige une information explicite sur la perte potentielle de fertilité, et la Pologne impose un consentement écrit après information complète, tandis que la France reste plus implicite sur ce point.

Actualités scientifiques de l’année

Parmi les interventions brossant l’actualité scientifique de l’année (« year in review »), celle de Dagmar Pauli s’est attachée à la santé mentale des enfants et adolescent·es en incongruence de genre. Les études montrent que, dans les échantillons cliniques, 32 à 78 % des jeunes présentent des troubles dépressifs ou anxieux, 13 à 75 % rapportent des pensées suicidaires ou des comportements d’automutilation, et 9 à 52 % ont déjà tenté de se suicider. Ces taux varient selon les pays et les contextes, mais indiquent une vulnérabilité psychologique significative. Les facteurs de protection les plus constants sont le soutien familial et celui des pairs, ainsi qu’une moindre exposition à la victimisation.

L’étude britannique de Jarvis et collègues (2025), sur 3 782 patient·es mineur·es en incongruence de genre suivi·es entre 2011 et 2021, souligne que, malgré une augmentation récente des diagnostics d’incongruence de genre, la condition demeure rare, et seule une minorité d’adolescent·es reçoit des traitements médicaux d’affirmation du genre (4,7 % ont reçu des bloqueurs de puberté, 8 % des hormones).

Les comparaisons internationales soulignent des variations culturelles mais aussi des constantes : dans plusieurs pays (Norvège, France, Pologne, Israël, Turquie, etc.), la majorité des jeunes concerné·es sont assigné·es filles à la naissance (58 à 86 %), un phénomène généralement expliqué par la transmisogynie, avec un âge moyen d’environ 15 à 16 ans. Les adolescent·es assigné·es filles à la naissance présentent généralement davantage de symptômes dépressifs et d’idées suicidaires que leurs homologues assigné·es garçons. Les taux de dépression oscillent entre 23 et 60 %, d’automutilation entre 15 et 70 %, et de tentatives de suicide entre 8 et 16 %.

D’autres recherches explorent les liens entre incongruence de genre, âge de la présentation clinique et troubles associés. Les adolescent·es plus âgé·es présentent des niveaux plus élevés de détresse psychologique que les plus jeunes, et une recherche de soins à un stade pubertaire plus avancé est associée à une plus grande psychopathologie (Topaz et collègues, 2024 ; De Rooy et collègues, 2024). Par ailleurs, environ 9 à 10 % des jeunes suivis pour incongruence de genre présentent également un trouble du spectre autistique, combinaison qui accentue les risques d’anxiété, de dépression et de suicidalité. Ces observations plaident pour une prise en charge individualisée tenant compte à la fois des particularités développementales et des co-occurrences neurodéveloppementales.

Les suivis longitudinaux montrent en moyenne une amélioration du bien-être psychologique après traitements hormonaux ou chirurgicaux, notamment une réduction de la dysphorie, de la dépression et de l’anxiété. Les adolescents bénéficiant d’un fort soutien familial et d’une faible victimisation tirent le plus de bénéfices des interventions (Chelliah et collègues, 2025). Des recherches américaines (Wittlin et collègues, 2025) confirment une stabilité émotionnelle et une satisfaction globale à long terme. La torsoplastie chez les adolescents et jeunes adultes trans est associée à des réductions significatives dans les symptômes dépressifs (Ewing et collègues, 2024). Les données sur les personnes ayant interrompu leur traitement restent limitées (Boskey et collègues, 2025, discuté sur Trajectoires Jeunes Trans ici), mais suggèrent de faibles taux d’interruption (4 %), associés à des troubles psychiatriques plus fréquents.

Enfin, Pauli souligne la complexité du lien entre incongruence de genre et troubles mentaux. Deux visions opposées – considérer la détresse psychique comme cause ou conséquence de l’incongruence – ne suffisent pas à rendre compte de la réalité, où les facteurs biologiques, sociaux et culturels interagissent. Le modèle du stress minoritaire permet d’intégrer ces dimensions, en reconnaissant que la stigmatisation chronique contribue à la vulnérabilité psychologique. Pauli appelle à dépasser la vision binaire de la réussite du traitement pour inclure la fluidité identitaire et la qualité de vie globale (Oosthoek et collègues, 2024). Un traitement « efficace » ne vise pas la disparition complète de la dysphorie de genre, mais la réduction du stress, l’amélioration du bien-être et la reconnaissance du vécu subjectif des jeunes.

En clôture, l’EPATH a présenté sa nouvelle présidente, Iva Zegura, psychiatre en Serbie, qui prend la succession d’Annelou de Vries. Elle a rappelé la tenue du congrès de la WPATH à Mexico, à la fin de l’année 2026, et annoncé le lieu du prochain congrès de l’EPATH : ce sera à Grenade, en Espagne, en 2027.

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