Dans une étude parue dans le « Journal of Adolescent Health », Natalie Wittlin et ses collègues de l’Université de Princeton explorent la santé mentale des adolescent·es trans ayant effectué une transition sociale « binaire » dès l’enfance et qui n’ont pas ou peu connu de puberté endogène avant d’entamer des soins médicaux d’affirmation de genre. L’étude se concentre sur un échantillon de jeunes trans qui ont pu bénéficier de bloqueurs de puberté et de soins hormonaux, et examine leurs trajectoires de santé mentale au fil des différentes étapes de leur transition médicale (avant bloqueurs et hormones ; après bloqueurs et avant hormones ; après hormones et avant chirurgie), comparant leurs niveaux de symptômes d’anxiété et de dépression à ceux de leurs pair·es cisgenres. Pour mesurer la présence de ces symptomes, l’étude s’appuie sur des questionnaires réalisés par les adolescent·es même ainsi que par leurs parents.
Les chercheur·ses ont mis en place une étude longitudinale prospective avec groupe contrôle, impliquant 183 jeunes trans des USA et du Canada, dont les parents les ont soutenus dans leur transition sociale dès le plus jeune âge. De par l’utilisation de bloqueurs de puberté, ces jeunes ont pu éviter une puberté endogène indésirée, et beaucoup ont débuté la puberté de leur genre d’affirmation par le biais des soins hormonaux. Les résultats de l’étude indiquent que ces jeunes trans montrent des niveaux relativement faibles et stables de symptomes internalisés de détresse psychologique au fil du temps et tout au long de leur transition médicale, bien que les parents des filles trans (mais pas ces dernières) aient remarqué chez leur enfant des symptômes dépressifs augmentant puis diminuant au fil du temps.
Les résultats montrent une différence notable entre les trajectoires de santé mentale des adolescent·es trans et celles de leurs pair·es cis. Les adolescentes cis, par exemple, ont rapporté des augmentations des symptômes d’anxiété avec l’âge, tandis que les garçons cis ont manifesté une diminution de l’anxiété auto-rapportée. En revanche, les adolescent·es trans ont généralement maintenu des niveaux d’anxiété et de dépression similaires à travers le temps, et plutôt intermédiaires entre les niveaux des garçons et des filles cis.
L’étude souligne le rôle protecteur des soins médicaux d’affirmation du genre, permettant aux jeunes trans de traverser l’adolescence sans les hausses typiques de détresse psychologique souvent observées chez les jeunes trans n’ayant pas d’accès à ces soins. En débutant leur transition médicale au moment de la puberté, ces adolescent·es ont pu vivre des changements corporels en accord avec leur identité de genre, ce qui semble limiter le développement de symptômes d’anxiété et de dépression.
Les auteur·ices insistent également sur l’importance du soutien familial dans la trajectoire positive de santé mentale des jeunes trans étudié·es. Les adolescent·es de l’étude ont bénéficié d’un environnement social favorable, ce qui a facilité leur transition sociale et, par conséquent, amélioré leur santé mentale. Ce soutien, en combinaison avec les soins médicaux d’affirmation de genre, pourrait expliquer la stabilité de leur bien-être émotionnel durant cette période complexe.
Dans leurs conclusions, Wittlin et ses collègues soulignent que la trajectoire de santé mentale stable observée chez ces jeunes trans est significative, compte tenu des difficultés souvent rencontrées par les adolescent·es trans comme la discrimination et l’invalidation. Cette étude démontre qu’avec un soutien familial et un accès aux soins d’affirmation du genre, les jeunes trans peuvent maintenir une bonne santé mentale au cours de l’adolescence.
Enfin, les auteur·ices encouragent des recherches futures à explorer davantage les expériences positives de la transition médicale, en intégrant des mesures de bien-être telles que la qualité de vie et la satisfaction générale. Iels suggèrent que ces indicateurs pourraient offrir une vue plus complète de l’impact des soins d’affirmation de genre sur les jeunes trans soutenu·es par leurs familles et leur environnement social.
Pour accéder à l’étude, cliquez ici.
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